La Feuille d'Hector du 5 juillet 2013, dernier éditorial avant l'été

Un Brésil incandescent (Editorial du 5/07/2013)

 

Le peuple brésilien a surpris tout le monde. Les clichés ayant la vie dure, nous pensions les Brésiliens surtout avides de football, de plage, voire de carnaval à une époque de l’année… Ces dernières semaines nous rappellent qu’il en est tout autrement dans cet immense pays de 194 millions d’habitants.

 

Les manifestations ont pris doucement de l’ampleur, déclenchées par l’augmentation du tarif des transports en commun, de 3 à 3,20 reais (1,05 à 1,12 euros). Tout le monde a été surpris, à commencer par la présidente, Dilma Rousseff, qui a aussitôt annulé un voyage au Japon prévu à la fin du mois de juin. Il semble que l’organisation de la Coupe des Confédérations de football ait servi de déclencheur. Cette compétition, sorte de grande répétition avant la Coupe du monde  de 2014, est venue rappeler à tous les Brésiliens que des sommes colossales – on parle de 11 milliards d’euros - sont investies pour cette organisation comme pour les Jeux olympiques qui suivront, en 2016.

 

En quelques jours, des Brésiliens frustrés, déçus par la politique du Parti des travailleurs (PT), un parti de gauche dont l’ex-président Lula reste la figure tutélaire, sont descendus dans la rue. Avec le problème des transports publics évoqué plus haut, la précarité d’autres services publics, comme la santé ou l’éducation, est mise en avant. À cela s’ajoute la corruption de la classe politique.

 

Jamais, depuis la fin de la dictature, en 1985, le Brésil n’avait connu pareil mouvement de protestation sociale. Des marches contre la pauvreté et la corruption avaient bien été organisées avant la présidence de Lula par le mouvement des sans-terre (MST), ces paysans qui luttent depuis longtemps contre les grandes propriétés, les latifundios. Dans ce pays, 1 % des propriétaires terriens possède 54 % des terres cultivables. En 2005, 12 000 personnes avaient marché de Goiana à Brasilia, soit 300 km, pour pousser Lula à tenir ses promesses de réforme agraire. Ainsi, une fois au pouvoir, le PT n’a pas mené les réformes promises, qu’elles soient agraires, électorales, du système de santé ou encore d’éducation.

 

Au travers des événements de ce mois de juin 2013, ce qui surprend le plus les observateurs, c’est de voir dans la rue les classes sociales moyennes, des intellectuels progressistes, des étudiants. Ce sont donc des gens qui ont vu leur niveau de vie s’améliorer, au cours de la dernière décennie, qui sentent aujourd’hui la société s’enliser et qui demandent que les choses changent, allant jusqu’à remettre en cause des organisations d’ampleur mondiale.

Jean-Paul

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Thème Noodle -  Hébergé par Overblog