Les affaires de moeurs et leurs dérives - 1ère Partie

Avant de vous proposer dans les semaines à venir, une interview de Maïtre Rault, avocate de Jean-Paul, voici un extrait d'une table ronde organisée par le collectif JAMAC à laquelle elle participait en décembre 2006 c'est à dire peu de temps après l'affaire d'Outreau.

Maître Rault donnait son point de vue sur ces affaires de pédophilie et sur leurs dérives...

Extrait :


"Trois ans avant le procès de Saint Omer, Paul Bensussan et moi même dénoncions les dérives de la protection de l’enfance, et ce que nous avons appelé la dictature de l’émotion. Il serait bon de se poser la question de savoir si cette dictature de l’émotion est toujours ou n’est pas toujours présente, et si ce n’est pas l’émotion précisément qui la plupart du temps gouverne ce type d’affaire. Depuis 1997, on peut se demander si le traitement des allégations d’abus sexuels a réellement évolué. Je ne voudrais pas me montrer trop pessimiste, mais, en prise directe avec la réalité judiciaire quotidienne, je regrette de devoir constater que nous ne progressons pas. Il est vrai que les choses ont évolué depuis 1997, et la fameuse circulaire Royal qui faisait d’à peu près chaque enseignant un pédophile en puissance. Cela a évolué parce que on a peu à peu délaissé le champ de l’enseignement. Je m’explique. A partir de la découverte de ces cadavres dans le jardin d’un certain Marc Dutroux, et puis cet emballement médiatique et politique de 1997 en France, pour ne pas être en reste avec la Belgique, on a assisté à un nombre considérable de mises en cause d’enseignants. Et puis comme tous les phénomènes de mode, il s’est essoufflé, et on peut dire qu’aujourd’hui il y a sans doute beaucoup moins de mises en cause d’enseignants. Mais il n’y a pas moins de mises en cause globalement et les statistiques le démontrent.

 

Le champ de l’enseignement a été délaissé au profit du couple, puisque nous avons eu après ces années 97-98-99 une série de mises en cause dans les divorces. Il devenait habituel d’accuser le père d’abuser des enfants dès lors que la mère ne souhaitait pas qu’il bénéficie de la garde ou d’un droit de visite. Un divorce pour faute sur quatre était parasité par des fausses allégations d’abus sexuels, ce qui est considérable. Ça s’est un peu calmé de ce côté-là aussi. Aujourd’hui il faut croire que les pédophiles sont légion et équitablement répandus car on les voit partout et le phénomène semble s’être étendu à toute la gente masculine. A l’heure actuelle c’est vrai que tout homme est supposé pouvoir agresser des enfants.

 

Cela revient quand même à dire que ces affaires ont pris une proportion incroyable. On en prend la mesure quand on sait qu’un quart des détenus le sont pour des motifs d’ordre sexuel ! On a beaucoup parlé des dysfonctionnements de la justice et on a eu raison d’en parler. Je crois qu’en cela l’affaire d’Outreau aura été exemplaire. Elle a montré à quel point la justice pouvait se tromper, à quel point la justice pouvait ne pas fonctionner. Mais mal fonctionner ou ne pas fonctionner du tout ? J’aurais plutôt tendance à dire en ce qui concerne l’affaire d’Outreau que la justice n’a pas fonctionné du tout. Et qu’elle est partie dans des errements tout à fait invraisemblables. Pas fonctionné du tout parce que le juge n’a pas fonctionné, la chambre de l’instruction n’a pas fonctionné, la cour de cassation n’a pas fonctionné, rien n’a fonctionné."

 

A suivre... 

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