Atelier d'écriture, Hors-série Décembre 2010

  • Les amis et proches de Jean-Paul Degache
  • La vie en prison

Pour débuter l'année 2011, nous vous proposons un article réalisé par Jean-Paul dans le cadre du numéro hors-série du journal de la prison consacré au thème du voyage. Il a ainsi choisi un sujet qui constitue l'une de ses passions dont il a été privé de pratique depuis le 26 mars 2010 : le vélo.

Bonne lecture !

 

Le vélo, instrument utilitaire, de loisir ou de compétition (Hors-série - décembre 2010)

 

Après avoir été négligée, voire ringardisée pendant plusieurs décennies, la pratique du vélo redevient tendance sous la double pression de la préservation indispensable de la nature et de l’économie de nos ressources naturelles. Quand l’être humain se sédentarise au maximum et a donc besoin de trouver toujours plus d’occasions pour se dépenser physiquement, pédaler permet de joindre l’utile à l’agréable.

Il suffit de regarder un film montrant la vie en France jusqu’à la fin des années 50 pour constater que le vélo était, depuis des décennies, un moyen de locomotion privilégié. L’automobile était loin de son développement actuel et beaucoup de familles n’en possédaient pas. Dans un pays à majorité rurale, le vélo utilitaire était même indispensable autant pour aller chercher le pain que pour aller rendre visite à un membre de sa famille. Ceci explique la popularité toujours croissante du Tour de France, créé en 1903, parce que tout un chacun était capable d’étalonner sa propre performance avec celles des champions de ce qu’on appelait « la petite reine ».

 

Petit historique

Si l’on revient encore un petit peu en arrière pour rappeler les principales étapes de l’histoire de la bicyclette, il faut saluer le génie du baron allemand Karl-Wilhelm Drais. En 1813, cet aristocrate met au point la première machine avec deux roues en ligne propulsée par les jambes avec un appui alternatif : la draisienne (image ci-contre à gauche).

 

En 1861, le Français Pierre Michaux invente la pédale qu’il adapte à la roue avant. Ainsi naît le vélocipède dont vélo est l’abréviation (photo ci-contre). Alors, les choses s’accélèrent. En 1868, les premiers clubs cyclistes sont créés à Rouen, Paris, Toulouse et la première course de vélocipèdes, sur 12 km, est organisée dans le parc de Saint-Cloud, à Paris. En 1880, l’Anglais James Moore en est le vainqueur. L’année suivante, on court Paris-Rouen toujours en appuyant sur les pédales fixées sur le moyeu de la roue avant. En 1880, l’Anglais Stanley lance une bicyclette à roue arrière motrice grâce à une chaîne, une évolution déterminante. Un an plus tard, l’Union Vélocipédique de France (UVF) voit le jour et organise le premier championnat de France. En 1887, John Boyd Dunlop, vétérinaire à Belfast, invente le pneumatique à valve et, trois ans plus tard, Robertson en Angleterre et Michelin en France, rendent ce pneu démontable. En 1905, Paul de Vivié invente le dérailleur que vulgarise Lucien Juy sous la marque Simplex : le vélo moderne est pratiquement au point. Il faut attendre 1983 pour voir Look s’inspirer du ski et mettre au point la pédale automatique, 1990 pour les premières obligations du port du casque et 2003, enfin, pour que cette protection essentielle devienne obligatoire dans toutes les courses cyclistes. De plus, l’utilisation du carbone se généralise dans la conception des cadres pour la compétition et même le loisir. Ce matériau composite remplace peu à peu l’acier, l’aluminium et même le titane, beaucoup trop cher.

 

A nous la ville !

Depuis une dizaine d’années, à cause de l’engorgement des villes par la voiture, le vélo est redevenu un instrument de locomotion très utile. En France, après un essai à La Rochelle, en 1974, c’est Lyon qui a lancé son Vélo’v en 2005, ces bicyclettes urbaines en location, disséminées en divers points de la ville. Paris Vélib’, puis d’autres villes - Bordeaux Vcub, Marseille le Vélo, Toulouse Vélôtoulouse, Montpellier Vélomagg, Aix en Provence V’hello, Nantes Bicloo, Rennes Vélo STAR, Strasbourg Vél’hop, etc… - n’ont pas tardé à imiter cette initiative couronnée de succès malgré quelques  soucis d’entretien. Indispensables pour la sécurité des cyclistes urbains, des aménagements cyclables sont réalisés petit à petit mais notre pays avait un tel retard que la tâche à réaliser reste énorme. En  8 ans, à Lyon et Villeurbanne, le trafic cycliste a été multiplié par 4. A Bordeaux 8% des déplacements en centre ville se font à vélo, contre 3 % il y a 10 ans. A Strasbourg, on en est à 15% pour l’ensemble de la ville.

Paradoxalement, en Chine, où le déplacement à vélo était la règle, donnant lieu à des images assez extraordinaires d’une marée cycliste dans les avenues pékinoises, la voiture prend la place des deux roues… jusqu’au jour où , embouteillages et pollution aidant, il faudra pédaler à nouveau !

En France, 23 à 25 millions de personnes (40% de la population) disent pédaler régulièrement. A ceux-là, il faut ajouter 10 millions d’utilisateurs occasionnels, soit encore 17% de la population.

Pour tous les utilisateurs, se pose le problème de la circulation, sur la route, avec les autres usagers. L’augmentation continue du trafic autour des villes et les accidents graves causés par des automobilistes imprudents dissuadent beaucoup de cyclistes désirant pédaler uniquement pour leur plaisir. Pourtant, comme la marche à pied, la pratique du vélo est excellente pour rester en bonne santé C’est pourquoi a été lancé, en 2001, le projet des Véloroutes et des Voies vertes. Il s’agit de créer ou de mettre en état des itinéraires cyclables jalonnés et sécurisés, de moyenne ou longue distance sans interruption. Par exemple, dans le Sud-Est, un projet est en train de se concrétiser pour relier le lac Léman à la mer Méditerranée, en suivant le cours du Rhône. L’objectif est d’arriver, en France, à 20 000 km aménagés avec l’aide des collectivités territoriales. Si cette solution est bonne pour une pratique tranquille du vélo, il ne faut pas oublier ceux, de plus en plus nombreux, qui utilisent cet instrument pour faire du sport.

 

Sur la route

Le réseau routier en France, est tellement dense et diversifié qu’il a, depuis longtemps, favorisé l’expression de ceux que l’on nomme cyclotouristes, cyclosportifs ou coureurs cyclistes. Si le cyclotouriste ne vise pas expressément la performance sportive, il ne peut se contenter d’itinéraires finalement assez limités où il sera amené à côtoyer des familles mais aussi des rollers, par exemple. Partant du principe que la route est à tout le monde, les cyclistes, qui sont aussi des contribuables finançant leur entretien, demandent à ce que l’on les respecte pendant qu’ils avalent des kilomètres. Ce droit, bien sûr, leur impose des devoirs. Contrairement à ce que l’on croit à tort, le code de la route n’impose pas aux cyclistes de rouler l’un derrière l’autre. Ils doivent simplement se mettre en file pour laisser le passage lorsqu’un véhicule se présente. Nous sommes là devant un problème de partage de la route et d’une volonté de vivre ensemble, en harmonie. Respecter un cycliste sur la route, c’est respecter un être humain, respecter la vie. Cela ne devrait pas être si difficile.

Enfin, il reste le problème de la compétition. Comme nous l’avons dit plus haut, la pratique cycliste a toujours été liée, dès l’origine, à la course, et ces épreuves se déroulent sur la voie publique. Pour parer à cela, il y a bien la piste mais la France est fort déficitaire en ce domaine. Pour quelques grandes épreuves qui bénéficient d’une privatisation de la voie publique1, il ne faut pas oublier toutes ces petites courses qui permettent aux jeunes de révéler, de progresser, de s’aguerrir. A cause des problèmes de sécurité, leur nombre a considérablement diminué. Les aménagements urbains et routiers dont on abuse depuis ces dernières années, apportent des dangers supplémentaires pendant les compétitions. Les organisateurs, tous bénévoles, se lassent et ne veulent plus prendre de risques. Ceci a pour conséquence de tarir peu à peu le vivier qui permettait de voir émerger ces champions qui enthousiasment les foules sur la route du Tour. De plus, il ne faut pas l’oublier, le coureur cycliste, comme le cyclosportif, a besoin de couvrir de nombreux kilomètres pour acquérir et maintenir la forme. D’où la cohabitation nécessaire dont nous parlions auparavant.

Instrument de locomotion né d’une géniale invention et perfectionné au fil des ans grâce, principalement, à la compétition, le vélo est un véhicule d’avenir, contrairement à ce que certains ont pu croire à une époque. Depuis l’enfant qui réussit à se passer des roulettes qui le stabilisent, jusqu’au champion cycliste, l’éventail est immense. Que ce soit pour un déplacement simplement utilitaire, pour prendre l’air ou pour mesurer ses forces avec d’autres, le vélo offre tellement de possibilités qu’il mérite d’avoir toute sa place dans notre société sans oublier que le jour où il n’y aura plus de pétrole…

 

Jean-Paul

 

: L’Etape du Tour (8 000 participants) et l’Ardéchoise (14 000 participants), deux épreuves cyclosportives de masse, bénéficient, totalement pour la première et partiellement pour la seconde, de la privatisation de leur parcours. Cela signifie la suppression totale du trafic habituel sur les routes empruntées et une protection efficace de la gendarmerie. En contrepartie, cela est facturé à l’organisateur.

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